RISQUER LE GRAND DÉBARQUEMENT
Centenaire de la Société des Missions-Étrangères du Québec,
une affaire de risques: risquer la joie, risquer la grande fraternité
planétaire, risquer le grand débarquement...
RISQUER LE GRAND
DÉBARQUEMENT
Notre
arche missionnaire sillonne depuis cent ans les eaux de la Terre. Chaque jour une
Colombe nous apporte sur ses ailes
des
nouvelles fraîches de tous ces peuples qui, après nous avoir accueillis à bras ouverts, en sont venus au
cours des ans à faire partie de nous-mêmes.
La
Colombe nous rapporte que la Paix a envie de naître dans tel pays, tandis que
dans tel autre elle veut rendre l'âme. Qu'ici, la Justice s'accroche à toutes
les branches, alors que là, elle continue de plus belle à être traînée
dans la boue. Comment, un matin, la Beauté se réveille tout en fleurs et le
soir, elle se couche dans les pleurs. Elle parle en riant des petites victoires
de la vie et elle pleure pour les malheurs que chaque jour amène. Quand on
l'entend, se glisse parfois en nous le sentiment que nous avons travaillé pour
rien... Mais toujours le vent nous pousse
plus loin.
Ces
derniers temps, tout effarée, la Colombe nous apprend que les grandes eaux de
la planète, loin de baisser, ne cessent de monter, et que partout dans le monde
se multiplient des cataclysmes de plus en plus effrayants. Elle nous assure que
la Terre est en train de chavirer.
Le
bouquet, c'est qu'au bout de cent ans de glorieux services, notre vieille arche
missionnaire craque de toutes parts. Sa coque prend eau de partout tandis que
son équipage dépasse dangereusement l'âge de conduire les bateaux. Pour comble
de malheur, notre Colombe vient de succomber à l'épuisement professionnel et se
trouve maintenant aux soins palliatifs... Il faut se rendre à l'évidence, notre
vieille arche n'est plus en condition d'assurer notre sécurité et notre salut.
Or,
le vent souffle plus fort et, que cela nous plaise ou non, il nous presse à prendre le grand risque de débarquer
de notre arche bien-aimée.... afin de reprendre par la suite le voyage
autrement. L'heure est venue de jeter
par-dessus bord nos cartes de navigation, nos boussoles, nos dictionnaires de
vérités, de croyances et de rituels fossilisés dans le béton. Surtout il faut que
nous débarquions de nos habitudes, de nos certitudes et de nos sécurités et plonger
avec la foi du vieil Abraham dans LA NOUVEAUTÉ D'UN MONDE DIFFÉRENT QUI FONCE DROIT
VERS NOUS.
Ce
monde n'est pas une lubie. Il est tout ce qu'il y a de plus réel. Et, bien qu'on
puisse avoir d'excellentes raisons de s'en méfier, CELUI-QUI-EST le bénit avec autant d'amour qu'il a béni par
le passé la méchante Ninive pour laquelle le brave Jonas éprouvait une telle
horreur qu'il se réfugiait dans les derniers recoins de la Terre pour se cacher
d'elle.
Nous,
les aînés, nous n'avons pas à nous inquiéter, car, à l'intérieur du monde qui
s'en va, nous avons fait pas mal de bonnes choses après tout. Chantons en paix notre
Nunc dimittis dans le grand repos que
nous avons largement mérité. Mais, à l'Instar du vieillard Syméon et de la
bonne vieille Anne, saluons un peu ce qui est là devant nous.
Ce
qui est devant nous, ce n'est pas gros. C'est presque rien. Et c'est aussi déconcertant
qu'un petit enfant très pauvre qui ne vaut pas plus que deux tourterelles... Cet
enfant va grandir dans le sous-monde des exploités et des réfugiés de la planète. Là,
il se forgera une sagesse plus grande que celle de Salomon. À sa sagesse rien
ne résistera, ni même nos dogmes les plus vénérés, ni notre façon de faire
église ou de faire la mission.
Sa
sagesse nous apprendra, entre autres, qu'il n'y a jamais eu et jamais il n'y aura d'autre
Dieu que le Dieu-Amour ("Amour" signifie ici: pure grâce, pure
gratuité, pur don). Puisqu'il est Dieu, il ne peut pas habiter dans les cieux,
ni dans les temples, ni dans aucun autre
lieu; au contraire, c'est l'univers qui habite en lui. La seule demeure qu'il
puisse avoir, c'est celle de l'amour. Par l'amour nous sommes enracinés en lui, et par l'amour
il vit en nous. Contre cette réalité, tempêtes, atrocités, catastrophes cosmiques
ne peuvent rien. En fait, ce qui souvent
semble n'être qu'absurdité, violence et chaos n'existe que sur une ligne très
mince à la surface des choses. La Réalité vraie est en-dessous et au-dessus de toutes
ces perceptions, quelque savantes et objectives qu'elles soient. Bien plus,
elle les dépasse infiniment.
À la lumière du Dieu-Amour, le mythe du péché
originel - et la grande théorie du rachat qui en découle- tombe en poussière. Le Dieu-Amour n'a jamais exigé qu'un Fils divin égal à lui-même, se
fasse humain pour offrir à son Père le sacrifice de valeur infinie de son
propre sang dans le but de réparer l'offense infinie du péché originel. Cette
histoire relève de la pure fiction et ne peut avoir été inventée que par des
prêtres obsédés par les sacrifices, eux qui, jour et nuit, au Temple, se dédiaient à immoler des victimes au
Tout-Puissant dans l'espoir toujours incertain d'apaiser ses incontrôlables
colères.
Pour l'homme de Nazareth qui aura grandi
jusqu'à nos jours pour émerger aujourd'hui dans un monde qui, depuis deux mille
ans, a grandi aussi, il sera inutile d'avoir
recours à des intermédiaires pour accéder
à Dieu. Car, depuis toujours, Dieu est pleinement présent à tous les
humains et à chacun d'entre eux, ainsi qu'il l'est, d'ailleurs, à la création
entière. Ses "portes", ses "bras" et son "cœur"
sont ouverts jour et nuit à l'univers entier. Nul besoin de frapper pour
entrer.
Tout le monde de bonne volonté qui embrassera
le grand projet de fraternité universelle fera partie de ce qui sera toujours
"l'église". Celle-ci, cependant, ne sera plus
constituée en monarchie absolue et ne se comportera plus comme "propriétaire" et dépositaire
exclusive de la vérité qui vient de Dieu. Elle ne sera plus dirigée par des dignitaires "mis à
part" et placés au-dessus du peuple
ordinaire, et chez elle la femme sera reconnue aussi digne que l'homme pour
exercer les services essentiels à la communauté.
Dans le souffle, c'est-à-dire dans l'esprit
et dans la façon de voir de l'Homme de Nazareth, il n'y aura plus d'envois missionnaires
pour aller "convertir" les autres; ne partiront en mission que les personnes
qui, étant déjà converties à la grande fraternité des humains, rêveront de l'étendre
au monde entier en allant la vivre en personne avec les groupes humains les
plus isolés ou moins favorisés de différents endroits de la planète... On repartira
de rien comme dans tous les nouveaux commencements. Ce sera la fin de nos
dernières idoles.
Les plus
jeunes seront moins affectés par ces chambardements parce que leurs racines
dans le passé ne sont pas très profondes. Feront-ils mieux que leurs aînés? Oui, car en eux il y a du neuf. Du neuf qui leur vient de CELUI-QUI-EST et qui, à son heure, le fera jaillir
de leurs propres profondeurs.
Enfin, jeunes ou vieux, hommes ou femmes, tous et
toutes, nous allons nous préparer
mentalement, psychologiquement et
spirituellement à faire le grand saut dans ce monde complètement nouveau,
avant que les cataractes géantes qui sont déjà très
proches ne fassent une seule bouchée de notre bonne vieille arche et de tout ce
qui sera resté dedans.
Eloy Roy
Je crois aussi fermement que Dieu est l"Amour Infini et donc, ne peut nous punir (enfer) car cela serait aller contre son essence. A l'image de Dieu, l'Eglise ne peut logiquement gouverner, mais aimer, i.e. avoir pour tous les fideles l'esprit missionaire, enseigner La Parole d'Amour que Jesus nous a donne et non des recettes de salut.
RépondreEffacerRoland Rivard
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