LES PIERRES CRIERONT!
NOTRE-DAME
DE PARIS BRÛLE,
LES
«GILETS JAUNES» NE LÂCHENT PAS.
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Ph. AP Thibault Camus. |
Le 15 avril au soir, un
incendie éclate dans les combles de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Au même
instant, le Président de la République s'apprête à prononcer un discours d'extrême importance au sujet des «gilets jaunes».
Tout le pays est sur le qui vive. Mais la
cathédrale brûle et le discours du Président est suspendu.
La veille de ce soir
fatidique, entre les murs de cette même cathédrale, un événement vieux de 20
siècles reprenait vie dans la liturgie du jour. En notre temps, cet événement serait
probablement signalé comme la «manif des
Rameaux». Parmi les participants, pas de «gilets jaunes», mais un groupe de
Galiléens décidés d'en découdre avec le pouvoir. Parmi eux, un certain Jésus de Nazareth...
Marginalisés depuis toujours, durement exploités par
les autorités locales et par l'occupant romain, les habitants de la Galilée n'en
peuvent plus. Ils protestent, mais on ne les entend jamais. Au contraire, on
les réprime sans pitié. Pour se faire entendre il faudra frapper un grand
coup.
Ces jours-là,
Jérusalem, capitale du pays et siège du pouvoir, est en liesse. Elle
célèbre la Pâque, la grande fête de la nation. La vieille fibre nationaliste de
tout un peuple se réveille. Des Juifs venus de partout montent à Jérusalem. C'est
l'occasion rêvée.
Un groupe de Galiléens surchauffés prend à son tour la direction de la capitale. Avec eux va Jésus. En raison de ses positions très critiques à l'égard des dirigeants, celui-ci est de plus en plus reconnu comme prophète. En arrivant donc aux portes de la ville, les Galiléens se regroupent avec grand bruit, font monter Jésus sur un petit d'âne, brandissent des rameaux arrachés
aux palmiers, étendent leurs manteaux sur le sol, entonnent des chants
patriotiques, et, en plein sous le nez des autorités du pays, font défiler Jésus en l'acclamant roi.
Est-ce une blague? Il semble que non. On interpelle Jésus:
«T'es fou, ou quoi? Tu veux mourir?...Fais-les
taire!» Pour toute réponse, Jésus met ses mains en porte-voix et crie à son tour:
«Je vous le dis: si eux se taisent, les PIERRES crieront!» (Luc 19, 40).
Or, à Paris, dans la
nuit du 15 au 16 avril, les pierres de la magnifique cathédrale (dont on dit
qu'elle est la plus photographiée du monde), ont bel et bien crié, et crient
encore. Depuis leurs 800 ans de vie, on les entend encore gémir dans les
flammes.
Des vitraux superbes
ont éclaté, d'importantes structures en bois et des œuvres de grand prix sont parties
en fumée. Mais l'essentiel des œuvres d'art et du bâti de pierre a été sauvé. Pour quelques milliards d'euros, la belle
Notre-Dame sera reconstruite.
Ph. Daniel Samulczyk
Non loin de cette
église de pierre dévorée par les flammes se tient une autre église. Une église
d'une autre sorte. Elle est de chair et d'os. Elle ne porte pas d'habits d'or
mais des... «gilets jaunes». Elle est un peu comme «l'église» du petit peuple.
Elle est là, debout, les larmes aux yeux. Elle prie sans trop savoir. Délabrée,
désorganisée, tapageuse, et maintenant hébétée, atterrée, dépassée par les événements, rien ne la décourage. Elle va continuer de manifester aussi
longtemps qu'elle n'aura pas vraiment été écoutée.
Car cette église des «gilets
jaunes», même non croyante ou non pratiquante pour le plus grand nombre, vaut
aussi cher que l'église de pierre en train de brûler. En fait, elle est d'une
valeur inestimable; elle mérite d'être sauvée infiniment plus que tous les
trésors de toutes les églises du pays. D'autant plus qu'une simple opération de
justice sociale qui lui permettrait de se relever coûterait probablement moins
cher qu'une reconstruction à l'identique de la bonne vieille église qui vient
d'être ravagée...
«S'ils se taisent, avait
dit Jésus, les pierres crieront»...
Jeudi prochain le
Président reprendra son discours. Il s'adressera à la nation pour donner sa
réponse aux «gilets jaunes». On verra si le cri des pierres de la cathédrale
incendiée aura été entendu.
PSAUME 74 (73)
Le Temple est saccagé, Israël est touché en plein
cœur. Le psalmiste a la mort dans l'âme. Où est Dieu? Jusques à quand?
Pourquoi?...
Égypte, Ninive, Babylone, et plus tard, Rome ne
supportent pas l'esprit rebelle de leur colonie juive. Ce petit peuple est
attaché jalousement à son indépendance. Pour lui, sauver ses lois, sa culture,
son Dieu est une question de vie ou de mort, c'est-à-dire le seul moyen de ne
pas se laisser avaler par les grands empires et de ne pas se dissoudre en eux.
TOI QUI ES, pourquoi traites-tu ton peuple si
durement,
l'aurais-tu rejeté pour toujours?
Autrefois, tu avais fait de nous ton peuple
particulier;
tu nous avais rachetés de l'esclavage en terre
étrangère,
tu avais fait de nous tes héritiers.
Souviens-toi du mont Sion
et du Temple où tu avais établi ta demeure.
Porte tes pas vers ces lieux aujourd'hui
dévastés:
ton sanctuaire a été ravagé de fond en comble!
Tes ennemis ont rugi dans l'enceinte de ton
temple,
ils ont saisi nos symboles sacrés
et les ont remplacés par les leurs.
On les a vus s'y ruer comme dans une épaisse
forêt, la hache au poing:
en un rien de temps ils avaient tout cassé.
À coups de haches et de marteaux
ils ont fracassé toutes les sculptures de ta
Maison,
ils ont mis le feu à ton sanctuaire,
ils ont profané et abattu la demeure de ton Nom.
En leur cœur ils disaient: "Pas de pitié
pour personne!"
Puis, ils brûlèrent tous les lieux saints dans
le pays.
Nos signes n'apparaissent plus nulle part;
nous n'avons plus de prophètes,
et parmi nous personne ne sait combien de temps
cela durera.
Jusqu'à quand, l'oppresseur continuera-t-il son
outrage,
quand cessera-t-il de te mépriser, TOI QUI ES ?
Pourquoi donc as-tu retiré la main de ta droite?
Sors-la de ton sein! Fais quelque chose!
Toi, mon roi dès les temps anciens,
vainqueur des combats sur la face de la Terre.
Tu as fendu la mer par ta puissance,
tu as fracassé les têtes des dragons sur les
eaux.
Tu as écrasé la tête de Léviathan, le crocodile,
pour le donner en pâture aux monstres marins.
Au désert, tu as fait jaillir des sources et des
torrents,
et dans la plaine, tu as mis à sec des fleuves
intarissables.
À toi est le jour, à toi, la nuit;
tu as créé le soleil et les astres.
tu as fixé les limites de la terre,
tu as établi l'été et l'hiver.
Souviens-toi qu'un ennemi t'a méprisé.
et qu'un peuple insensé a blasphémé ton Nom!
Ne laisse pas la bête égorger ta Tourterelle.
Par amour pour ton alliance,
n'oublie pas pour toujours la vie de tes
malheureux!
Vois, la guerre est partout,
et les cavernes du pays regorgent de brigands.
Que l'opprimé échappe à la honte!
Que le malheureux et le pauvre célèbrent ton
Nom!
Lève-toi, ô TOI-QUI-ES, défends ta cause!
Souviens-toi que des insensés t'outragent chaque
jour!
N'oublie pas les ravages qu'ils font,
écoute les cris de haine qu'ils poussent sans
fin contre toi!
Nous
avons dit: «Nous sommes le Christ.
Nous
avons la vérité.
Dieu est
avec nous.
Nous
toucher, c'est toucher Dieu»
Nous
avons planté nos temples partout.
Nous
sommes devenus la connaissance, la santé,
la
pensée, la conscience
et la vie
même de tous les peuples.
Nous
étions la puissance même de Dieu,
nous
étions «la chrétienté».
En dehors
de nous il n'y avait pas de salut.
Nous
avons fait de grandes choses
nous
avons enseigné le bien
nous
avons fait le bien
même que
nous l'avons imposé
souvent
avec des armées.
Innombrables
furent nos abus...
C'est
pourquoi aujourd'hui
nos
signes ne parlent plus,
nos
paroles
même les
plus sublimes
sonnent
creux.
Nos
temples s'écroulent,
notre encens
se refroidit.
Nous
sommes devenus des ombres...
Dans la
poussière,
nous
attendons une nouvelle création.
PSAUME 102 (101)
Un homme est détruit par
la maladie; il pleure sa misère. Il est devenu une ruine. Il ressemble à
Jérusalem qui a été saccagée et n'est plus qu'un tas de poussière... "Tu
vas tout créer de nouveau, TOI QUI ES!"
Ô TOI QUI ES, entends ma
prière :
que mon cri parvienne
jusqu'à toi !
Viens vite,
réponds-moi!
Mes jours s'en vont en
fumée,
mes os brûlent comme un
brasier ;
mon cœur se dessèche comme
l'herbe fauchée,
j'oublie de manger mon pain
;
à force de gémir, ma peau
colle à mes os.
Je ressemble au corbeau du
désert,
je suis pareil à la hulotte
des ruines :
la nuit, je veille comme un
oiseau solitaire sur un toit.
Le jour, mes ennemis
m'outragent et me maudissent.
La cendre est le pain que
je mange,
je mêle à ma boisson mes
larmes.
M'aurais-tu rejeté, TOI QUI
ES?
L'ombre gagne sur mes
jours,
et je me dessèche comme
l'herbe.
Pourtant, TOI QUI ES, tu es
là pour toujours ;
d'âge en âge on fera
mémoire de toi.
Attendri pour ta Ville, tu
te lèveras;
il est temps de la prendre
en pitié,
car l'heure est venue.
Tes serviteurs ont pitié de
ses ruines,
ils aiment jusqu'à sa
poussière.
Quand tu rebâtiras Sion,
quand tu apparaîtras dans
ta gloire,
quand tu te tourneras vers
la prière du spolié,
quand sa prière ne sera
plus méprisée,
les nations respecteront
ton nom, ô TOI QUI ES,
et tous les rois de la
Terre te glorifieront.
Ton peuple, que tu auras
créé de nouveau,
chantera ta louange,
et pour l'âge à venir il
sera écrit:
« Du haut de son
sanctuaire, CELUI QUI EST s'est penché ;
il a regardé la terre; il a
entendu la plainte des captifs,
il a libéré ceux qui
devaient mourir. »
Dans Sion on célébrera CELUI
QUI EST,
sa louange retentira dans
tout Jérusalem
lorsque les royaumes et les
peuples viendront
et se rassembleront pour le
servir.
Oui, ma force s'est brisée en chemin,
le nombre de mes jours
s'est réduit,
mais j'ai dit : « TOI QUI
ES,
ne me prends pas au milieu
de mes jours ! »
Tes années recouvrent tous
les temps :
autrefois tu as fondé la
Terre,
le Ciel est l'ouvrage de
tes mains;
l'une et l'autre passent,
mais toi, tu demeures :
ils s'usent comme un
vêtement
qu'on remplace par un
autre,
alors que toi, tu restes le
même ;
tes années n'ont pas de
fin.
Les enfants de tes
serviteurs vivront en ce pays,
et leur descendance se
maintiendra devant toi.
Eloy Roy
Pâques, 21 avril
2019
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