30 avril 2012

Le gros méchant





LE GROS MÉCHANT

On croyait que le gros méchant, c’était celui qui cassait les jambes des travailleurs non syndiqués ou non affiliés au bon syndicat. On croyait que c’était celui qui offrait  des pots-de-vin au maire et contribuait à la caisse du parti pour décrocher les meilleurs contrats. On croyait que le gros méchant, c’était celui qui gonflait les factures et qui vendait sa mère pour faire des sous. On croyait que c’était la commission scolaire en croisière dans les Caraïbes. On croyait que c’étaient les PDG de nos institutions financières et de nos universités qui se donnent des salaires et des primes toujours plus hauts. 

On croyait que le gros méchant c’était notre généreux gouvernement qui trouve toujours des centaines de millions de dollars au fond de ses coffres pour paver le chemin aux minières, aux pétrolières et aux gazières, ce gouvernement qui aide les multinationales à vider notre pays de ses richesses et à le dévaster en échange de si peu de sous qu’on demande aux étudiants de faire leur part pour que ces mêmes compagnies nous aiment, restent chez nous et nous pillent tout leur soûl.

On croyait que c’étaient eux les méchants, eux qui cassaient tout, eux qui détruisaient le pays, eux qui brisaient le lien de confiance entre les citoyens et leurs institutions, eux qui semaient la haine, le cynisme, la méfiance et la mort dans nos rangs. On croyait que c’étaient eux les violents.

Mais non! On l’avait tout faux! Le gros méchant, le coupable, celui qui met en péril notre nation, c’est Gabriel Nadeau-Dubois! Voilà le responsable de tous nos maux! Il a la gueule d’un ange, mais c’est un démon! C’est lui l’ennemi à abattre! Pourquoi?

Parce qu’il est jeune. Parce qu’il appelle les choses par leur nom, parce qu’il ose soulever le couvercle des milliers de marmites pourries qui couvent sous les robes de respectabilité de notre société cool. Et surtout parce qu’il a l’appui de la gauche, de la terrible gauche, de la dangereuse gauche du Québec. Car, au Québec, être du côté de la vérité et de la justice, c’est être de gauche. Être du côté des travailleurs, c’est être de gauche. Et être de gauche c’est un très très gros péché! Car, enfin,  c’est connu, Dieu est de droite… Demandez-le à Harper et au Tea Party.  

Mais heureusement qu’au Québec nous avons un premier-ministre qui veille au grain. Un premier-ministre qui ne craint pas de se mouiller. Un premier-ministre qui est reconnu pour ses allergies à tout ce qui est croche, mafieux, louche et corrompu. Un premier-ministre qui ne se fait pas tirer l’oreille pour faire le grand ménage chaque fois que la  racaille tente de faire la pluie et le beau temps dans le pays. Heureusement qu’il est là. Il a le pouvoir, bien sûr.  Il a la police à son service pour matraquer les vrais méchants et mettre en taule les vrais violents.  Il est entouré de puissants amis, mais, face  au terrible danger que représente Gabriel Nadeau-Dubois, il est vraiment pauvre, vraiment seul, vraiment dépourvu.  Il a besoin de nous!

Que tout ce qu’il y a de droit, d’honnête, de lucide, de brave et de fédéraliste serre les rangs aux côtés de notre cher premier-ministre, notre seul espoir, notre gardien de la paix, notre désintéressé serviteur du peuple! Ne le laissons pas seul!

Écrasons l’infâme porte-parole de la CLASSE! Tenons au plus vite des élections et accordons sans lambiner un quatrième mandat à Jean Charest, notre seul sauveur! Qu’il revienne au pouvoir au plus tôt et soit majoritaire pour l’éternité!

Qu’au pays des minières, des pétrolières et des gazières règne enfin la paix sous un ciel sans nuages!
Et que les étudiants fassent leur juste part pour que ce beau rêve devienne réalité!

P.S.: Tiens bon , Gabriel! Tenez bon, Martine, Léo et tous les jeunes! Vous êtes fabuleux!

                                                              Eloy Roy
                                                    


20 avril 2012

DU SACRÉ AU RATIONNEL




Beaucoup d’entre nous sont nés en nageant dans le religieux, dans le sacré, dans l’eau bénite jusque par-dessus la tête. La divinité était omniprésente dans les moindres recoins de nos vies. Nous étions pieux, dévots, superstitieux, crédules, dociles, bons enfants. Nous étions mystiques aussi. Nous sublimions tout.

Pour nous, le mal, le désordre, les malheurs venaient du péché. Il fallait combattre le péché en nous, autour de nous et partout, par le sacrifice, la force de volonté, la discipline, la violence même, et aussi par les missions.

Parfois on osait regimber un peu, mais nos révoltes ne faisaient pas long feu. On croyait en un Dieu infiniment bon, mais on croyait aussi qu’on ne méritait rien de sa bonté. Il fallait sans cesse lutter pour se montrer dignes de ses biens. Rien n’était jamais trop beau ni trop grand pour notre Dieu. Aussi, à tous les coins de rue, nous lui élevions des églises sans rien ménager. Et nous lui donnions notre vie sans compter. On entrait dans les ordres religieux à pleines portes et on s’engageait avec ferveur à une vie d’austérité, de prière, de don de soi.

Nous nous estimions chanceux, privilégiés même, de connaître cette voie de salut, qui nous avait été révélée à nous et demeurait cachée aux nations… Aussi, par les missions que nous soutenions généreusement, nous volions jusqu’aux extrémités de la terre partager ce trésor avec la masse des humains qui « gisaient dans les ténèbres et l’ombre de la mort. »

Quand nous étions encore dans la survie, cette vision de la vie était à la fois réconfortante et dure. Nous connaissions les règles. Nous savions à quoi nous en tenir. Nous étions héritiers des joies du ciel pourvu qu’on y mît du sien, qu’on acceptât la réalité qui nous écrasait et qu’on y fît face avec résignation - et- courage. Tout ce qui mettait en question cette façon de voir les choses était mauvais.

Puis tout doucement a émergé la raison. Le développement de l’industrie, de la science, la croissance des villes, les changements sociaux nous ont fait prendre conscience qu’il y avait d’autres façons de voir, de faire, de penser. Qu’on pouvait en quelque sorte être maître de son destin, maître de le forger, de le bâtir. Qu’il y avait peut-être moyen de se libérer de la vie ardue qui nous attachait à la terre et nous forçait à en accepter les lourdes contraintes. On s’est donc ouverts à d’autres façons de voir. L’homme était-il seulement un impuissant, un méchant, un coupable, un instrument du destin, un jouet dans les mains d’un Dieu qui ne lui passait rien ?

On a découvert que nous étions surtout ignorants. On s’est mis à essayer de comprendre et puis à tout expliquer… À tout concilier. À essayer de rendre la religion et Dieu plus raisonnables, plus compréhensibles, plus humains. On a alors redécouvert Jésus comme un être humain et, peu à peu, on a pris en main notre destin.

Les lumières de la raison et de la science qu’on avait toujours plus ou moins méprisées, sont devenues soudain notre salut et Jésus, un compagnon de nos recherches et de nos cheminements. Il n’était plus le Sauveur devant qui on s’agenouillait.

Ce fut un printemps pour la liberté. Un vent de libération a déferlé sur nous. Nous sommes devenus les seuls maîtres de nous-mêmes.

On en est là. Faudrait-il revenir en arrière ? Non. Rester où nous en sommes ?...

                                                                 Eloy Roy

3 avril 2012

MARCHER SUR LES EAUX





Le langage de l’Évangile n’est pas le nôtre. On se trompe toujours en le lisant comme si les gens d’il y a deux mille ans pensaient, s’exprimaient ou écrivaient comme nous. Leur manière à eux était probablement celle des conteurs populaires ou du théâtre de faubourg.

À l'époque, peu de gens savaient lire. Ce qui est rapporté dans les évangiles a d’abord été raconté, joué et peut-être mimé dans des petits groupes et devant des foules diverses, suscitant la ferveur et l’admiration, et sûrement aussi la controverse et le débat. C’était un peu la télévision du temps, le discours ou le spectacle improvisé au fond de la ruelle, à l’ombre d’un arbre ou sur la galerie de l’auberge.

Jésus était pour plusieurs l’imbattable héros de l’heure. Ses nombreux admirateurs ne se lassaient pas de raconter son histoire. Chacun y mettait un peu les couleurs qu’il voulait, et sûrement en rajoutait au passage pour le plus grand plaisir de l’auditoire.

L’important c’était de faire connaître cet homme qui avait changé leur vie. Un homme qui avait tout simplement mis fin aux superstitions, aux peurs, au fossé sans fond qui tenait les gens ordinaires très loin de tout ce qu’on nommait Dieu, loin de sa miséricorde, loin de son cœur.

Un homme qui avait pris plaisir à abolir un tas de tabous, de préjugés ancrés dans le sacré, à jeter par terre les épaisses murailles qui séparaient les genres, les races, les classes, les nations, les peuples, les religions.

Un homme qui avait pris plaisir à démasquer l’idolâtrie des oppresseurs de toutes sortes, et l’hypocrisie de ceux qui   passaient pour des saints alors que leurs exigences religieuses n’étaient que des prétextes pour abuser des faibles.

Un homme qui savait que cela lui coûterait la vie et qui n’a pas reculé devant la mort. Un homme hors mesure, un être étonnant, un être merveilleux.

Un homme qui inspirait le courage, l’audace, la dignité. Qui redonnait confiance en l’humanité, redonnait l’espoir et le goût de vivre. Qui laissait voir que les choses pouvaient être changées et non plus subies. Que rien n’était immuable, rien n’était classé, rien n’était définitif, fixé d’avance et pour toujours.

Pour décrire cet homme, il n’y avait jamais d’expression ni d’images trop fortes. Rien de trop beau ni de trop étonnant.

Donc, inutile de nous casser la tête pour savoir comment Jésus peut être né d’une vierge ou être ressuscité d'entre les morts, ni pour savoir s’il a vraiment marché sur les eaux, multiplié les pains, changé l’eau en vin, rendu la vue à un aveugle-né, ni  pour savoir s’il est vraiment vivant dans le pain et le vin du partage eucharistique ou qu’il a été exalté à la droite de Dieu. En gros, ces expressions veulent dire la même chose : « Tout ce que Jésus a été dépasse la croix, le tombeau, la mort. La mort n’a pas pu venir à bout de Jésus. Il est vivant, actuel et  puissant.»

«La preuve qu’il n’est pas parti et qu’il agit toujours, c’est que nous, nous sommes là. Avec lui nous avons dit non à la mort. La mort n’est plus la maîtresse de nos vies. Notre unique Maître, c’est lui, le Vivant. Parce que nous avons repris son projet afin de le continuer, on nous tuera  peut-être comme lui-même a été tué. Mais nous de reviendrons pas à nos tombeaux, à nos peurs, à nos injustices,  à nos esclavages. Si nous mourons avec lui, avec lui nous vivrons!» (2 Timothée 2, 11-12).


À la suite de ces premiers témoins de Jésus, les chrétiens de tous les âges, dont la foi plonge de profondes racines dans les mêmes eaux, ont pu et peuvent encore proclamer aujourd’hui que c’est dans l’appui qu’ils s’apportent  les uns aux autres, dans leur solidarité, dans leur amour fraternel et leur engagement en groupe qu’ils puisent une liberté, une force  et un bonheur qu’ils n’auraient pas connus autrement.

Ils peuvent à leur tour raconter :

«C’est ici, dans ce que nous vivons entre nous, que nous palpons que Jésus a renversé le mur de la mort, qu’il est vivant, que nous l’entendons nous parler, et que nous sentons sa propre respiration, son souffle».

«C’est lui qui encore, à travers nous, continue d’éclairer, de pardonner, de rassurer, de guérir, de libérer, de ressusciter ce qui est mort».

«À travers lui, nous avons  vraiment vu Dieu, car personne ne peut ressembler davantage à Dieu que cet homme. À travers lui, nous avons connu aussi toute la grandeur et la profondeur de l’être humain, car personne n’a été plus humain que lui. Et puis nous avons enfin compris qu’avec Dieu plus rien n’est impossible. »

«C’est pourquoi nous croyons et affirmons qu’un monde autre est possible. Oui, nous croyons que de notre impuissance même, de notre rien, nous pouvons faire des merveilles. Nous croyons que nos cœurs de pierre sont capables de se fondre en cœurs de chair et que nous pouvons recréer ce monde sans répandre la mort.»

«Nous croyons en la puissance de l’amour. Nous savons que l’amour a des capacités d’audace, de créativité, d’intelligence, de science, de liberté, de dépassement et d’humanité illimitées».

«De nos profondeurs intérieures jaillissent des forces inconnues et de nos rochers des fleuves de vie. Nos terres brûlées, empoisonnées, déchirées, rendues mortes par nos armes, nos haines, notre insatiable cupidité, notre inconscience, nos insouciances, nous les changerons en vergers et pâturages verdoyants. Nous purifierons l’air de notre ciel et laverons l’eau des mers et nous restaurerons la vie sur toute la surface de notre globe». 

«Non, rien n’est irréversible ! Tout peut changer. Tout peut être transformé. Tout peut être illuminé et recréé. Nous aurons encore longtemps à ramer à contre-courant, mais c’est la vie qui aura le dernier mot et toute l’humanité finira par ‘marcher sur les eaux!’»

                                                                                 Eloy Roy



  OPTION JOIE! Le monde est à l’envers. Notre planète s’en va chez le diable. Comme lave de volcan des fleuves de sang coulent sur les f...